Arthrose et obésité : un lien prouvé

arthrose et obésité

Les symptômes de l’arthrose et le handicap qu’elle induit sont très nettement aggravés par l’obésité. Cela est admis et prouvé. L’évolution de la maladie est plus rapide lorsqu’il y a surpoids, c’est une autre certitude.
Dans le déterminisme de l’arthrose on connait bien les facteurs mécaniques, génétiques et biochimiques mais aussi l’obésité qui y joue un rôle majeur, que ce soit sur les articulations portantes, mais aussi non portantes.

Le lien entre arthrose et obésité selon la localisation

Qu’en est-il de l’arthrose de genoux ?

Beaucoup d’études épidémiologiques ont mis en évidence un lien significatif entre l’index de masse corporelle (IMC) et le risque de développer une gonarthrose. Un kilogramme par mètre carré en trop au-dessus d’un IMC de 27 augmente ce risque de 15 %.

L’effet néfaste de l’obésité est plus fort chez la femme que chez l’homme et est plus lié à une atteinte bilatérale qu’unilatérale. Cette relation existe pour tous les compartiments du genou. Les défauts d’alignement augmentent fortement le risque de gonarthrose chez les malades obèses.

En revanche, l’amaigrissement diminue les douleurs et améliore la fonction, surtout en association avec l’exercice physique.

Qu’en est-il de la coxarthrose ?

Le rapport entre l’obésité et le risque de coxarthrose est bien moins évident surtout pour les formes bilatérales. Par contre le surpoids est un facteur d’aggravation des symptômes qui mène plus vite à la prothèse.

Arthrose de la cheville

La cheville portant en définitive l’ensemble du poids du corps, il semble probable que le surpoids soit un élément important dans le développement de la maladie.

Arthrose des doigts

L’obésité semble être un facteur de risque pour l’arthrose digitale et c’est cette information qui rend possible le rôle systémique de l’obésité dans cette maladie puisqu’elle touche là les articulations non portantes.

Des explications possibles au lien entre arthrose et obésité

Le stress mécanique

L’augmentation de la pression provoquée par l’excès de poids est la première hypothèse qui vient à l’esprit pour expliquer l’augmentation du risque d’arthrose sur une articulation portante en favorisant la destruction du cartilage. Mais aussi l’entretien de ce stress de surcharge sur une articulation normale peut modifier le comportement des cellules : chondrocytes et ostéoblastes et altérer leur entourage comme les fibres de collagène.

On sait aussi que les patients obèses ont tendance à augmenter leur masse osseuse ce qui peut aboutir à un durcissement de la zone osseuse située sous le cartilage facilitant ainsi des cassures dans sa structure. Ces altérations de la matrice peuvent être en partie la conséquence de l’activation de mécanorécepteurs présents à la surface des chondrocytes amorçant ainsi une cascade de réactions de destruction cellulaire. Ces mécanorécepteurs de nombreux types favorisent l’apparition de substances qui détruisent le cartilage (interleukine-1, metalloprotéases, prostaglandine E2, monoxyde d’azote) et à une inhibent la synthèse de matrice. Le chondrocyte va prendre un costume de démolisseur.

Des mécanorécepteurs sont aussi présents à la surface des ostéoblastes à l’origine de la production de médiateurs pro-inflammatoires après compression (IL-6, IL-8, metalloprotéinases, PGE2) modifiant très tôt l’os qui est en dessous du cartilage. Certains pensent même que cette phase de modification osseuse commencerait avant l’atteinte du cartilage.

Des médiateurs systémiques

L’arthrose n’est pas qu’une maladie mécanique comme le suggère l’arthrose des doigts. Elle prend même en la circonstance une allure inflammatoire.
Par ailleurs c’est la diminution de la masse graisseuse en cas d’obésité qui entraine une amélioration des symptômes de l’arthrose plus que la perte totale de poids.

Il existe bien en effet des facteurs adipeux sécrétés par la graisse : adipocytokines ou adipokines. Ces substances jouent un rôle dans la sensibilité à l’insuline, le métabolisme glucidique et lipidique, etc. Les plus connues sont : la leptine, la résistine, l’adiponectine et la visfatine.

Des effets indirects

L’obésité cohabite très fréquemment avec l’hypertension artérielle, l’athérosclérose ou le diabète. Si aucune preuve n’a jusqu’à présent été apportée d’une association entre ces maladies et l’arthrose, on peut cependant établir quelques relations.

Le diabète, par exemple, s’accompagne d’altérations des matrices extracellulaires par accumulation de produits de glycation, les AGE. Ces substances rigidifient les matrices qui deviennent plus sensibles aux agressions environnementales et activent des cellules à récepteurs spécifiques dénommés RAGE. Cela peut être envisagé au niveau du cartilage avec fragilisation de la matrice par ces substances AGE et activation des récepteurs RAGE de certains chondrocytes qui vont alors produire des médiateurs pro-inflammatoires et prodégradatifs.

L’athérosclérose pourrait être à l’origine d’altération de la vascularisation de l’os sous-chondral.

Les liens entre l’obésité et l’arthrose sont donc loin d’être définitivement connus. Cette possibilité d’une participation de facteurs systémiques élargit encore plus les rôles possibles de l’obésité dans l’apparition de l’arthrose, ouvrant peut-être la voie vers de nouvelles cibles thérapeutiques.

D’après Obesity and osteoarthritis: What are the links? Francis Berenbaum, Jérémie Sellam in numéro 6, 2008 de Joint Bone Spine.