Congrès Eular 2011 (European League Against Rheumatism)

Congrès de l'EULAR 2011

Londres, 25-28 mai 2011

Soyons clair, pas de scoop cette année au congrès de l’Eular mais plusieurs confirmations majeures :

  • La rhumatologie, du moins sa “branche inflammatoire”, a bel et bien changé de siècle il y a 10 ans avec les biothérapies en lien direct avec une meilleure compréhension intime des mécanismes physiopathologiques des maladies inflammatoires chroniques au premier chef la polyarthrite rhumatoïde (TNFa) suivie des spondylarthropathies (IL-17 et 23) du lupus systémique (IFNa) et des autres maladies de système.
  • Rapidement des concepts de fenêtre d’opportunité, diagnostic précoce et contrôle serré avec ajustement thérapeutique prédéfini ont émergé et transformé le pronostic fonctionnel et vital de nos patients les plus gravement atteints de PR. “Traiter tôt , vite et fort”, du moins les patients à potentiel évolutif sévère.
  • Eular 2011 va encore plus loin en s’intéressant aux phases pré-cliniques de certaines de ces pathologies (“pré-PR”, Gougerot Sjögren), leur phase humorale précessive s’étirant parfois sur de longues durées (7 à 14 années). À l’émergence de l’arthrite indifférenciée, le profil cytokinique, chemokinique, apoptotique de la synoviale est différent les 3 premiers mois de celui de la future PR active chronique, confirmant la nécessité d’un diagnostic précoce et la possibilité de manipulations thérapeutiques efficaces très tôt.
  • Des diagnostics toujours plus précoces et des traitements ciblés de plus en plus personnalisés. Nous nous approchons de l’ère de la théranostique (puces ADN, matrices décisionnelles biocliniques, imagerie des formes infra radiologiques, profil immunologique et cytokinique des futurs répondeurs et intolérants potentiels). La théranostique ou pronostic des thérapeutiques sera une médecine prédictive personnalisée qui aidera le médecin à sélectionner ses patients éligibles à des traitements puissants mais couteux. Aux autres les traitements du XXe siècle encore efficaces et bien moins onéreux du moins… en coûts directs.

Exemple :

Le rituximab RTX est un anticorps monoclonal antiCD20 responsable d’une déplétion sélective des lymphocytes B naïfs activés et des plasmocytes de vie courte (mais préserve les lymphocytes B mémoires).

Dans la PR, le RTX présente :

– une bonne réponse si forte positivité du facteur rhumatoide (FR) des anticorps antipeptides citrullinés (ACPA), du taux d’IGG, de la presence d’un polymorphisme de la region régulatrice du gêne Baff

– pas de bonne réponse si expression élevée des marqueurs plasmablastiques

– pas de bon maintien thérapeutique si réapparition précoce des lymphocytes B et des plasmoblastes à 6 mois

  • Les essais d’immunotolérance (vaccination) progressent dans la PR avec les rheumavacs, injections de cellules dendritiques autologues exposées à des peptides citrullinés pour activer les lymphocytes T régulateurs neutralisant les lymphocytes T effecteurs mais aussi l’immunisation active par injection d’interféron alpha fixé au kinoïd (IFN-k) dans le lupus systémique.
  • Quid demain des biomédicaments (anticorps ou facteurs de croissance) par thérapies géniques (transfert de gènes), des thérapies cellulaires par injection de cellules souches mesenchymateuses embryonnaires totipotentes ou adultes seulement pluripotentes pour remplacer un tissu lésé ou dégénéré, des nanomédicaments ciblant un type de cellules pathologiques, des nanoéchaffaudages matriciels…
  • En 2011, les biothérapies s’exportent dans l’ostéoporose avec le denosumab anticorps monoclonal anti-rank ligand, le canakinumab (traitement des syndromes auto-inflammatoires) anticorps anti IL-1 beta sera peut-être le traitement des crises réfractaires de goutte. Dans l’arthrose, les biothérapies peinent avec des essais sur l’inhibition du nerve growth factor (NGF) mais ce puissant antalgique malheureusement accélère le recours à la chirurgie de remplacement articulaire… On peut espérer davantage des nanotechnologies, des thérapies cellulaires dans les années à venir…
  • Enfin, de quoi décèdent nos patients “inflammatoires” ? De pathologies cardiovasculaires. La PR est devenu un facteur de risque CVx indépendant des autres facteurs de risques classiques, le lien entre l’inflammation et les processus athérogènes est fait via la crp, mais les situations sont complexes et les risques aggravés ou diminués selon les divers traitements (ains, corticoides methotrexate, acide folique…) et les co-morbidités associées.

Le patient reste une globalité et le rhumatologue se doit de garder un esprit “interniste” du fait de la transversalité et de l’interdépendance des connaissances médicales. Les effets bénéfiques multiples extra-osseux de la vitamine D en sont un des exemples actuellement des plus médiatisé…

Rhumatologue – Dr Jean-François MARC